Si la mode est connue pour être un éternel recommencement, elle l’est tout autant pour son esprit de provocation. Pour plaire, il faut choquer. C’est le cas de l’union entre la haute couture et la mode urbaine, j’ai nommé le streetwear de luxe, la street couture ! Véritable phénomène de société, décryptons cette tendance surprenante, mais qui, il faut bien le reconnaître, n’est pas passée à côté du succès : la rencontre du luxe et du streetwear.
Streetwear de luxe : une relation antinomique
Pour beaucoup, le streetwear de luxe est une antinomie par excellence. Les hoodies, les casquettes et les baskets d’un côté, les tenues élégantes de la haute couture de l’autre. Un peu comme si vous imaginiez votre vieille voisine guindée porter un jogging oversize sous son manteau en vison, une casquette à l’envers vissée sur sa permanente aux reflets bleus.
En effet, ce style vestimentaire né à la fin des années 70 dans les banlieues pauvres américaines semble ne rien avoir en commun avec le style bourgeois contre lequel il s’érigeait. Comment marier une contre-culture avec le style contre lequel elle se bat ?
Contre toute attente, la mode urbaine est bel et bien devenue le nouvel horizon des grandes maisons de haute couture : Louis Vuitton et Hermès se mettent aux doudounes, Balenciaga conçoit des baskets, Gucci des casquettes, etc.
En somme, le streetwear de luxe a fait monter la rue sur les podiums, créé une passerelle entre deux mondes en apparence opposés.
Le luxe n’est plus l’apanage des mamies ou des fashionistas !
Luxe et streetwear, une ascension sur fond de réussite sociale
La mode urbaine, comme son nom l’indique, vient de la rue, là où ont grandi les artistes hip-hop. Mais dans les années 90, la réussite de certains est telle qu’ils peuvent amasser des fringues monogrammées qui leur permet d’étaler leur réussite sociale au vu de tous. Bling-bling et tapageur, leur style lance les prémices de la street couture.
S’ensuivent des collaborations streetwear de luxe entre des les maisons de haute couture et les marques de sportswear, comme celle entre Louis Vuitton et Supreme en 2017, qui connut un succès retentissant.
Il faut dire que les égéries de cet univers de co-branding leur offrent une communication toute trouvée : à $ AP Rocky, Pharelle Willliams ou encore Kanye West sont des ambassadeurs acharnés de la communion du luxe et du streetwear.
La street couture : un marché porteur
Ce qui peut intriguer, c’est la volonté derrière cette démarche. En tout cas pour les maisons de haute couture. Comme souvent dans la vie, c’est avant tout une question de gros sous : les marques vont là où l’argent se trouve ! Le streetwear de luxe leur permet indéniablement d’élargir leur clientèle et de rajeunir leur image. Le luxe et la haute couture ne sont plus réservés aux stars du grand écran !
On ne peut toutefois s’attaquer au phénomène de la street couture sans rendre à César ce qui lui appartient. Et par César ici, il faut comprendre Virgil Abloh. L’ex-bras droit de Kanye West a fondé sa propre marque de mode urbaine de luxe Off-White, avant d’être nommé Directeur Artistique des collections homme chez Louis Vuitton en 2018 ! Il est l’image même de l’ascension fulgurante du streetwear de luxe, celui qui a permis aux baskets et aux casquettes de fouler les catwalks aux côtés des costumes, des robes dos-nu et des escarpins !
À son image, les directeurs artistiques des maisons de haute couture sont de plus en plus jeunes. Et ils créent une mode qui leur rappelle leur enfance, voire leur adolescence. Ajoutez à cela les tendances véhiculées par les réseaux sociaux et la télé-réalité, et vous obtenez tous les ingrédients pour faire d’un mélange improbable des genres un succès générationnel. Génération qui, d’ailleurs, prône l’inclusivité et la déconstruction : quoi de plus parlant que de marier le luxe et le streetwear ?
Sans compter que viser une clientèle plus jeune, c’est s’assurer la longévité de leur fidélité et profiter de l’effet de mimétisme du groupe.
La street couture, une nouvelle forme de révolution
En somme, le streetwear de luxe est l’union de deux courants complètement opposés réunis dans une révolution des codes de la mode. La haute couture se démocratise, la mode urbaine s’embourgeoise (à 3500 euros la doudoune, on a le droit de parler d’embourgeoisement !) : la boucle est bouclée !
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